#1J1P : le 26 février 1916, le torpillage du PROVENCE II

Ven. 26 Fev. 2016
2 commentaires

Provence II est d’abord affectée au blocus de l’Allemagne. En 1915, un front est ouvert au Proche Orient, Provence II, avec Flandre et La Savoie, est associée à la Bataille des Dardanelles, qui visait à isoler la Turquie. Elle est patrouilleur et elle participe aux opérations de Koum-Caleh et de Seddul-Bahr sous les ordres de l’Amiral Guepatte. Mais l’expédition de la Grande-Bretagne et de la France échoue et les troupes sont alors évacuées vers Salonique fin 1915- début 1916. Provence II est affectée au ravitaillement et au transport de troupes vers Salonique. 
 
Le 23 février 1916, Provence II quitte Toulon, son port d’attache pour les opérations dans la Méditerranée, avec à son bord un contingent de 2000 militaires dont un important détachement du IIIe Régiment d’Infanterie Coloniale destiné au renfort des troupes, 400 hommes d’équipage et environ 200 chevaux et mulets de l’armée. Le 26 février 1916, au large du Cap de Matapan (Grèce) (38°58 de latitude Nord et 18°59 de longitude), Provence II est touchée à tribord par une torpille du sous-marin allemand U35, du Commandant Von Lothar de la Perrière, à 15 heures. L’ordre d’évacuer est donné et le Capitaine de Frégate Vesco conserve son sang-froid pour organiser l’évacuation. Eugène Pian, qui pourtant n’est pas de garde à ce moment-là, rejoint le poste de Télégraphie Sans Fil où se trouve Joseph Huby, son adjoint, avec qui il envoie des SOS. 17 minutes après son torpillage, Provence II coule. Tout comme le Commandant Vesco et d’autres membres de l’Etat-major et de l’équipage, Eugène Pian reste à son poste jusqu’au bout et est englouti avec Provence II quand le navire sombre. Les rescapés sont recueillis par le navire hôpital français Canada, le torpilleur français Fantassin, l’aviso britannique Marguerite et le torpilleur français Cavalier. Seuls 870 hommes ont survécu à ce naufrage. 

Quelques Isèrois étaient à bord cette nuit là :
 
Récit du soldat Louis Leroy :
Le 26, jour de la catastrophe, le matin, au réveil, nous étions en pleine mer, nous ne voyions plus de côtes, la mer était de plus en plus houleuse ; tout le monde était sur le pont et l'on était très gai ; car de temps en temps des paquets de mer arrivaient et beaucoup chantaient « le rouli-rouli». A 2 h. 3/4, j'allai donner à boire et à manger à mes chevaux. Cette corvée dura à peu près dix minutes. Je n'avais pas posé le seau avec lequel je venais de donner l'avoine quand j'entends un bruit sourd et un choc venant de l'arrière du bateau. Je jette les yeux de ce côté et j'aperçois de la fumée qui sortait. C'est alors que je compris que nous avions été torpillés. Au même instant, je passais au-dessus du pont où la torpille avait touché le bateau. J'aperçus deux hommes tués sur le pont arrière.
 
Sans perdre mon sang-froid, malgré les cris que j'entendais, je pris aussitôt le soin de couper mes lacets de souliers, puis j'attendis le moment propice pour me jeter à l'eau, mais il fallait ouvrir l'œil parce qu'un commencement de panique se produisait à bord. Les baleinières étaient mises à la mer avec précipitation ainsi que des madriers et des radeaux. Beaucoup de soldats sautaient dans les baleinières d'une hauteur de quinze mètres, ce qui était fou ; beaucoup ont dû se briser les jambes. A un moment donné, ayant aperçu un endroit favorable pour plonger, je me dis : c'est l'instant, et, d'un seul bond, je saisis une corde et je saute à la mer sur un point où il n'y avait personne, et me voilà nageant ; après avoir parcouru une cinquantaine de mètres, j'attrape un radeau déjà chargé de quinze hommes, je prends place avec eux.

A chaque vague, j'étais dans l'eau jusqu'au ventre ; cela ne faisait rien, je me sentais en sécurité. Le paquebot n'a guère mis qu'un quart d'heure avant de disparaître complètement, et je vous assure que, pendant ce quart d'heure, j'ai vu un spectacle affreux. J'avais fait à peine vingt mètres à la nage quand il s'engloutit complètement ; il y avait peut-être encore près d'un millier de soldats et marins ; sur le pont supérieur ; je vis le tout s'engouffrer avec le bateau d'un seul coup. Il en restait au moins trois cents sur l'eau, maintenus par des ceintures de sauvetage, d'autres étaient sur des balles de foin ou sur des planches, chacun s'accrochait où il pouvait.
 
La nuit se passa dans l'attente des secours, car nous savions que le signal d'alarme avait été donné ; ce ne fut qu'à 3 heures du matin qu'on vit un phare de torpilleur et, d'un autre côté, le feu d'un autre bateau. Aussitôt, ce fut la joie dans nos cœurs à la pensée que nous étions sauvés. A 6 heures du matin, nous étions embarqués à bord d'un torpilleur, et jusqu'à midi nous ramassions d'autres naufragés ; à midi, nous étions en route pour l'île de Milo où nous arrivions à 8 heures du soir.
 
Voilà ce que fut ce voyage si brutalement interrompu.








 
 

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Commentaires :

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  • laboutiquedelatelier dit :
    11/11/2016 à 7h 06min

    @ Alphy : Merci de votre correction que nous allons mettre à jour

  • Alphy dit :
    06/10/2016 à 14h 05min

    Bonjour, M'intéressant au naufrage de la Provence II dans le cadre des recherches sur les soldats de ma commune mort en 1916 j'ai pu dans votre article relever une erreur. La Provence II n'a pas été coulé par l'UC 38 (sous-marin mouilleur de mines mis en service le 26 octobre 1916) mais par le U35 du Commandant Von Lothar de la Perrière (as des as de l'arme sous-marine tous pays et toutes guerre confondues). Ce torpillage est noté dans le livre de bord du U 35. Bien cordialement Eric Dodet

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